Demander l’asile en France, procédure Dublin : voici ce qu’il faut retenir
La procédure Dublin III (passage par un autre État de l’Union européenne)
Pour plus de détails : Gisti, Les notes pratiques, L’accompagnement des demandeurs et demandeuses d’asile en procédure « Dublin », avril 2018, 48 pages, 7 €
Selon le règlement Dublin III, un seul État membre est responsable de l’examen d’une demande d’asile dans l’Union européenne (UE).
Selon ce règlement, c’est :
- Si vous avez fait une demande d’asile dans un autre État membre de l’UE, ce pays reste responsable de votre demande d’asile (que la demande soit encore en cours ou rejetée) ;
- Si vous n’avez pas demandé l’asile ailleurs, le règlement « Dublin III » prévoit des critères examinés les uns après les autres qui permettront à la France de déterminer l’État responsable. A titre d’exemple, il peut s’agir de l’État qui vous a accordé un visa ou un titre de séjour, ou le pays par lequel vous êtes entré et dans lequel vous avez été contrôlé en premier. Cette responsabilité de l’État membre prend fin douze mois après la date du franchissement irrégulier de la frontière. D’autres critères, plus positifs, sont prévus comme la minorité ou les liens familiaux que vous auriez en France (articles 7 à 17 du règlement).
3-1. La détermination par la préfecture de l’État responsable d’une demande d’asile
Pour cela, elle consulte :
- le fichier système d’information sur les visas (SIV)pour vérifier si vous avez obtenu un visa pour un autre pays de l’Union européenne ;
- le fichier Eurodac dans lequel sont enregistrées vos empreintes digitales si elles ont été relevées dans un des 28 pays de l’UE ou des 4 pays « associés » : Norvège, Islande, Suisse et Liechtenstein.
Le fichier Eurodac recense :
- les demandeuses et les demandeurs d’asile (catégorie 1 – empreintes conservées 10 ans) ;
- les personnes qui sont interpellées lors du franchissement irrégulier d’une frontière extérieure (catégorie 2 – conservées 18 mois).
Les personnes qui se trouvent illégalement sur le territoire d’un État membre (catégorie 3) peuvent voir également leurs empreintes comparées, mais leurs empreintes sont détruites après la comparaison.
3-2. La procédure Dublin
S’il est prouvé que vous êtes passé dans un autre pays de l’Union européenne, vous êtes placé en procédure « Dublin » ; vous êtes alors reçu en entretien individuel en présence d’un interprète. La préfecture doit vous remettre le compte rendu de cet entretien.
La préfecture doit également vous remettre plusieurs brochures d’information dans une langue que vous comprenez : une sur la prise d’empreinte (brochure A), une sur la procédure « Dublin » (brochure B) et une sur le règlement Eurodac.
Même si elle n’est pas l’État responsable de la demande d’asile, la France a la possibilité d’examiner votre demande (notamment article 17 du règlement : clauses discrétionnaires). C’est pourquoi il faut donner à la préfecture toute information et tout document utile qui pourrait pousser la France à examiner votre demande d’asile, comme :
- la délivrance d’un titre de séjour ou d’un visa par la France par le passé ;
- la présence en France de membres de votre famille en situation régulière, en demande d’asile ou disposant d’une protection ;
- des mauvais traitements subis dans l’État de l’Union européenne dans lequel on veut vous renvoyer.
3-3. Les délais
Tout au long de la procédure « Dublin », la France et l’État dit responsable ont des délais à respecter (délai pour saisir l’autre État et délai pour répondre).
Si vous n’avez pas été transféré dans les 6 mois à compter du jour où le pays dit responsable a donné son accord, la France devient responsable de votre demande d’asile. Pour connaître la fin du délai de 6 mois, il faut regarder la décision de transfert ou le laissez-passer vers le pays de transfert. Si vous avez fait un recours contre la décision de transfert, le délai de 6 mois commence, en cas de décision négative du tribunal, à courir à partir de la notification de la décision du tribunal (voir 3-5. Le recours contre la décision de transfert).
Les procédures de placement en fuite se multiplient ces derniers mois, et ce, dès l’introduction de la demande d’asile car les préfectures prononcent davantage d’assignations à résidence qui contraignent les demandeurs d’asile à de nombreux pointages dans les commissariats. Les convocations des préfectures sont parfois rédigées de manière à faire peur (« rendez-vous au bureau de l’éloignement, venez avec vos bagages, rendez-vous dans les bureaux de la police aux frontières afin d’exécuter votre mesure ») et fixent d’autres rendez-vous (convocation Ofii pour une proposition d’aide au transfert).
Si vous êtes placé en fuite, contactez un avocat ou une association car il est possible de faire un recours auprès d’un tribunal administratif afin de contester ce placement (voir la note de jurisprudence du Gisti et les modèles de référés).
Si vous êtes placé en fuite et que vous ne faites pas de recours ou que vous perdez votre recours au tribunal, il faudra attendre 18 mois pour déposer à nouveau une demande d’asile en France. L’Ofii arrêtera également de vous verser l’ADA. En matière d’hébergement, tout dépend du centre dans lequel vous êtes hébergés. Certains essayeront de vous garder le plus longtemps possible, d’autres n’hésiteront pas à vous mettre rapidement à la porte.
3-4. Conséquences sur votre demande d’asile
Pendant toute la procédure « Dublin » :
- vous ne pouvez pas déposer de demande d’asile en France (à l’Ofpra). La préfecture vous remet une attestation de demande d’asile spécifique « procédure Dublin » ;
- vous avez les mêmes droits que les autres demandeurs d’asile (allocation pour demandeur d’asile, protection maladie, scolarisation des enfants, etc.). En ce qui concerne l’hébergement, toutefois, vous ne serez pas accueilli dans un centre d’hébergement pour demandeurs d’asile (Cada) mais dans un autre type de centre (fiche 2-2) ;
- vous pouvez être assigné à résidence pendant pendant une partie de la procédure et, même, être placé en centre de rétention pour être renvoyé dans l’État responsable de votre demande d’asile. Les placements en rétention sont de plus en plus fréquents surtout depuis l’adoption de la loi du 20 mars 2018 qui légalise le placement en rétention pour la plupart des personnes en procédure « Dublin » considérant qu’il y a quasi systématiquement un « risque non négligeable de fuite ».
3-5. Le recours contre la décision de transfert
Lorsque l’État responsable a donné son accord, une décision de transfert est notifiée (page 1, page 2 et page 3). Vous pouvez contester cette décision devant le tribunal administratif (recours suspensif).
- vous devez saisir le tribunal administratif dans un délai de 7 jours (le tribunal aura ensuite 15 jours pour rendre sa décision).
- si vous êtes placé en rétention ou assigné à résidence, vous devez alors saisir le tribunal dans un délai de 48 heures après avoir reçu la décision de transfert.
Votre transfert ne peut pas avoir lieu avant ce délai ni tant que le juge n’a pas rendu de décision.
L’utilisation de ce recours est une arme à double tranchant. En cas de recours contre la décision de transfert, le délai de 6 mois pour effectuer le transfert ne se calcule plus à compter de la réponse de l’État responsable mais à partir de la notification de la décision définitive du tribunal (tribunal administratif ou cour administrative d’appel en cas de recours). Ainsi, le délai de 6 mois « repart à zéro » à partir de la date de la notification de la décision du tribunal. Attention donc si la décision de transfert vous a été notifiée en fin de procédure (au bout du 4e ou du 5e mois), la France dispose à nouveau, à partir de la notification de la décision, d’un délai de 6 mois pour vous transférer.
Si le juge annule la décision sur une question de forme, le préfet peut reprendre un autre arrêté de transfert en bonne et due forme. Dans ce cas, il vaut mieux ne pas se manifester et attendre la fin du délai de 6 mois avant de retourner de soi-même à la préfecture.
Si vous contestez la décision de transfert, signalez si vous avez subi des mauvais traitements dans l’État dans lequel on veut vous renvoyer ou si les conditions d’accueil des réfugiés dans ce pays étaient mauvaises (défaillance de l’État). Ces deux arguments sont importants pour contester le transfert.
Il faut demander conseil à une association compétente sur le sujet.
3-6. Le recours contre la décision d’assignation à résidence
Si vous êtes assigné à résidence, il faudra généralement vous rendre dans un commissariat, souvent deux fois par semaine ou même plus, pour y signer un registre.
Si vous voulez savoir si une convocation est dangereuse (risque d’interpellation), demandez conseil à une association avant de vous décider car ne pas y aller pourra aussi avoir de graves conséquences (attendre 18 mois sans aucun droit avant de pouvoir déposer sa demande d’asile en France).
Le recours contre l’assignation à résidence aura les mêmes conséquences que le recours contre l’arrêté de transfert.
Vous devrez faire des choix lors des différentes échéances (recours, convocations), qui auront des conséquences plus ou moins graves en fonction des préfectures (arrestation, placement en fuite).
Vous pouvez voir les différentes pratiques dans les préfectures d’Île-de-France : www.lacimade.org/dublin-etat-des-lieux-et-conseils-pratiques-en-ile-de-france/
3-7. Les personnes transférées qui reviennent en France
Si jamais vous revenez en France après une expulsion vers un autre État de l’UE, plusieurs situations peuvent se présenter :
- la préfecture refuse d’enregistrer à nouveau votre demande d’asile. Dans ce cas, contactez une association pour engager une procédure contentieuse contre ce refus ;
- la préfecture accepte votre demande mais vous place à nouveau en procédure « Dublin » et le parcours recommence à zéro. Il semble que les préfectures soient encouragées à aller dans ce sens.
Il est possible de montrer à la préfecture que vous avez eu une obligation de quitter le territoire dans le pays où vous avez été transféré, ou d’expliquer que les autorités vous ont obligé à repartir vers la France. Il peut également être utile d’apporter des éléments prouvant que vous avez a des liens en France qui peuvent peser dans la décision de la préfecture. Lors de ce passage, essayer de vous faire accompagner par une personne parlant bien le français, qui pourra expliquer la situation. Attention à bien garder une copie de votre obligation de quitter le territoire car certaines préfectures vous les prennent. - la préfecture enregistre votre demande d’asile mais vous place en procédure accélérée avec comme motif « a fait échec à la procédure « Dublin » ». Dans ce cas, contactez une association pour engager une procédure contentieuse si, par la suite, l’Ofii vous refuse l’ADA ;
- enfin, dans le meilleur des cas, la préfecture peut aussi enregistrer votre demande d’asile en procédure normale et vous remettre le dossier Ofpra.
titre documents joints
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Brochure d’information Dublin (PDF – 1.4 Mo)
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Brochure d’information Dublin 2 (PDF – 595.8 ko)
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info document (PDF – 166.1 ko)
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info document (PDF – 153 ko)
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info document (PDF – 337.1 ko)
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info document (PDF – 225.7 ko)
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info document (PDF – 246.8 ko)
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info document (PDF – 141.4 ko)
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info document (PDF – 200.5 ko)
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