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Déguerpissement au camp militaire de Kindia : plus de 600 maisons concernées, les habitants de Tafory contrariés

Les jours deviennent de plus en plus compliqués pour les habitants des secteurs du quartier Tafory concernés par les opérations de déguerpissement enclenchées par le gouvernement de la transition dans le cadre de la construction de la clôture du camp de la première région militaire de Kindia.

Depuis le lancement des travaux, les citoyens de ces différentes localités sont partagés entre inquiétude et un manque d’information de la part des autorités.

L’inquiétude est grande dans le secteur Bibane relevant du quartier Tafory Gangan, dans la commune urbaine de Kindia. Les habitants de cette zone se trouvant selon les autorités dans la circonscription du camp militaire de Kindia sont sommés de libérer les lieux. Selon Mömöya Sylla, responsable du quartier, le domaine sur lequel se trouve aujourd’hui ce camp militaire a été donné par leurs grands-parents.

« C’est nos arrière-grands parents qui ont donné ce domaine aux Blancs, ils ont construit le camp. Quand ils sont venus pour la première fois, ils étaient à Sambaya mais comme ils mouraient là-bas, nos parents leur ont octroyé un domaine ici et quand ils sont venus, ils ont mis la limite au niveau des rails. Jusqu’à présent, les limites sont visibles là-bas. Quand on a eu l’indépendance sous l’ère Sekou Touré, Moussa Sacko est devenu fédéral ici et ils sont venus partager le domaine, ils ont délimité le marché en le nommant marché M’Balia, ils ont aussi enlevé Villa Syli qui a été construite pour le président Sekou Touré. Et le reste a été partagé entre Yiranba, les Gabriel, Bossimoui etc…Après les gens ont eu le courage et ils ont construit des maisons. Après feu Sékou Touré, le président Conté aussi est venu, et ce problème a encore surgi. Le président Conté est venu un matin dans son hélicoptère, après un tour à pied, il a dit aux militaires de nous laisser ici qu’il y a trop de monde. Donc nous sommes restés dans ça jusqu’à ce que nous avons vu récemment des machines sillonner et creuser des fossés jusqu’au niveau du marché M’Balia qui est maintenant occupé par ces militaires. Comme on n’a pas été informé, nous sommes sortis faire le constat pour voir quelles sont les concessions qui seraient concernées et nous avons recensé plus de 600 maisons qui se trouvent dans leur clôture qu’ils sont en train de construire. Les Blancs avaient installé le camp ici mais si ce n’était pas pour courir on ne les voyait pas. Aujourd’hui nous sommes entourés par la cour et nous sommes dans l’enceinte du camp, on ne sait quoi faire et nous sommes inquiets », explique-t-il.

Dès après la pose de la première pierre des travaux de construction de la cour de ce camp militaire qui s’étend sur une superficie de 5 kilomètres, les citoyens de Tafory vivent avec la peur au ventre. Des démarches sont effectuées auprès des autorités administratives mais en vain. Se trouvant aujourd’hui dans un désarroi total après la mort de son mari militaire, Ami Camara comme la plupart des habitants de ces secteurs concernés ne sait plus à quel saint se vouer. « Quand mon mari m’a épousé, nous sommes ici à Bibane et cela a dépassé 40 ans. Nous avons connu de pressions de la part des militaires depuis le temps du feu Général Lansana Conté jusqu’à nos jours. Un jour, on était assis, je finissais de préparer, nous avons vu des militaires devant nous avec une convocation que nous sommes demandés mais en partant de partir avec les papiers de notre domaine. On a fait ça mais depuis nous n’avons rien eu comme réponse. Un jour soudain, on les a vus en train de démolir des maisons qu’ils veulent clôturer le camp. Depuis ça nos maris, les responsables du quartier, les femmes personne n’est tranquille, nous avons fait des démarches pour comprendre ce qui se passe mais rien. Aujourd’hui nous avons très peur et nous sommes inquiets parce que c’est ici que nous avons fait toute notre vie, nos maris étaient des militaires. On ne sait plus quoi faire et après tous nos efforts dans la pauvreté, on a construit une maison et s’ils disent aussi de démolir ça, c’est mieux de mourir que de rester dans cette souffrance. S’ils font ça, c’est de dire que nous nous ne sommes pas des Guinéens, nous sommes des réfugiés. Il y a des gens parmi nous, c’est des feuilles de patate qu’ils revendent pour nourrir leur famille, d’autres montent sur le Gangan pour chercher du fagot et revendre pour nourrir nos enfants. Démolir nos maisons comme ça, c’est de nous pousser vers la mort », dit- elle.

Si des informations de démolition des habitations circulent dans ces localités depuis le Ramadan dernier, aucune nouvelle officielle n’a été donnée aux concernés. Certains responsables et femmes de la localité se demandent si le président de la transition, le colonel Mamadi Doumbouya est au courant de leur situation ?  » Nous sommes là aujourd’hui désespérés, aucune information, on est inquiet. Des papiers sont partis de partout même à Conakry. Jusqu’à présent personne n’est venu pour nous dire quelque chose. Je pense le sens commun voudrait si tu veux faire quelque dans un lieu habité par ta population, il faut venir auprès d’elle, lui expliquer et trouver une solution mais rien de ça n’a été fait. Nous sommes dans l’inquiétude et on se demande si le président Mamadi Doumbouya a eu vent de ce qui se passe ici, mais nous pensons que c’est non! Parce que ce sont ces pauvres mamans, pauvres citoyens qu’ils sont en train de chasser à un lieu où ils ont fait des siècles. On pense s’il reçoit ces papiers, il trouvera une solution à notre problème Donc nous lui demandons de faire face à notre cas, nous n’avons pas des moyens même de payer des loyers à plus forte raison de construire une maison. Nos maris ne sont plus là et nos fils sont petits », alerte Mme Sylla, Fatoumata Camara, habitante du secteur Bibane.

Ces citoyens ont peur de rester dans la cour du camp de la première région militaire de Kindia, c’est pourquoi certains demandent aux autorités de la transition de respecter la limite de feu le Général Lansana Conté. Le chef secteur Bibane, Mamadou Dramé Sylla tire la sonnette d’alarme. « Nous ne ferons que supplier le président Mamadi Doumbouya de nous venir en aide parce que nous ne pouvons rien contre l’Etat et nous sommes ses citoyens, nous leur demandons de nous pardonner, il n’y a que des pauvres ici, aucun fonctionnaire si ce n’est des militaires. Donc de nous aider », dit-il.

Libreopinionguinee avec Mediaguinee

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