Après la démission de l’équipe de Mamady Youla, Portrait-robot du futur gouvernement
A l’occasion de la commémoration de la Fête internationale des femmes le 8 mars 2018, Alpha Condé a annoncé un remaniement en profondeur de son gouvernement. Depuis, pas de budget pour les différents départements ministériels. N’est-ce pas fait à dessein pour éviter un éventuel pompage avant le départ de certains qui ne seront pas dans le futur navire gouvernemental? Le stratagème a-t-il une visée politique ou électoraliste? Nous avons fait le choix de dresser un portrait-robot de la future équipe.
L e suspens aura été de longue durée avant de voir le Premier ministre, en marge du traditionnel Conseil des ministres du jeudi 17 mai 2018, remettre au chef de l’Exécutif la lettre de démission du gouvernement dont il était le chef. Du coup, Alpha Condé a déclaré prendre acte de la démission avant d’instruire à Mamady Youla et son équipe de gérer les affaires courantes jusqu’à la mise en place d’un futur gouvernement. Au Palais du peuple jeudi 8 mars 2018, le président de la République a annoncé le remaniement du gouvernement. Alpha Condé a dit dans quelle condition il voudrait le faire. Notamment à travers l’ouverture des consultations pour ne pas être isolé dans la prise de décision, mais aussi pour pouvoir prendre en compte au plus possible l’attente populaire. Il est vrai que ce n’est pas le premier qui a été mis en place par le président Condé, encore moins le second. Toutefois, ce gouvernement qui, probablement, sera mis en place, reste plus attendu que tous les autres qu’il a eu à former par le passé. L’erreur n’est donc pas permise dans la constitution de celuici, tant l’espoir est immense et les attentes, importantes. En prenant une décision aussi délicate par rapport à un enjeu d’ordre national et une attente extraordinaire dans la précipitation, le président Alpha Condé avait-il mesuré la complexité de la question ? Cela mérite bien d’être posé. Car, de l’avis des connaisseurs, on n’annonce pas le remaniement en profondeur d’un gouvernement sans avoir sous sa main la liste de ceux qui doivent le composer. Vers la perfection… Il faut se hâter, mais se hâter lentement. L’on comprend aisément pourquoi il s’est inscrit dans un processus de concertations internes. Certes, celles-ci lui permettront de mieux orienter son action. Mais le plus important est que quel que soit le temps qu’il prendra pour le faire, le mieux serait qu’il le fasse bien, sans décevoir l’espoir de l’opinion. Autant mentionner qu’il ne contentera pas tout le monde, du moment où il n’y a pas d’œuvre parfaite. L’on ne devrait donc pas s’attendre à un remaniement qui ferait l’unanimité. Contenter tous les Guinéens serait donc une prétention que personne ne pourrait satisfaire. Car, Dieu même ne fait pas l’unanimité, même si chacun de nous, selon les religions, est tenté de croire en Lui. Ceci dit, Alpha Condé ne devrait pas s’attendre à faire l’unanimité ou à ce que son action ait l’adhésion de tout le monde. Ce qui est le plus important, c’est moins de contenter individuellement que de prendre en compte cette aspiration profonde et intime de chaque guinéen de voir les choses changer qualitativement et d’avoir aussi des hommes plus ou moins légitimes. La problématique de légitimité peut être par rapport au parcours, tout comme elle peut être même par rapport aux préjugés favorables quant au choix d’un homme. Ce qui sous-tend qu’il ne faut pas perdre de vue cette exigence démocratique d’avoir des hommes représentatifs, en qui les populations se reconnaissent. Aussi, il y a l’exigence des résultats qui suppose donc que les hommes qui sont appelés à des fonctions soient aptes à les exercer. Cela étant, la compétence technique reste inconciliable avec l’assise politique ou sociale. La Guinée n’étant pas en carence de cadres à la fois compétents et légitimes, le chef de l’Etat ferait mieux de prendre en compte ces deux exigences. Tradition A lire entre les lignes de l’histoire, l’on s’aperçoit clairement qu’à chaque fois qu’un président de la République a été élu, il lui a été d’abord reproché d’être victime de ses collaborateurs. Ensuite, en évoluant dans le jugement, on a aussi dit que c’est lui-même, le président, qui constitue le nœud gordien. Cette autre hypothèse ne semble pas tenir la route, du moment où il n’y a pas d’exercice solitaire du pouvoir, du moins, à cette époque que nous vivons et même dans les contextes de démocratie. Même si par ailleurs, on dit clairement : « ça démissionne ou ça ferme la gueule ». La démission n’étant pas de culture guinéenne, ce qu’il y a lieu de savoir, la loyauté à un chef d’Etat n’est point synonyme de flatterie de son égo ou de volonté de manipuler son opinion, pour lui plaire. Non ! Sauf que l’attitude de la plupart de ceux qui servent les présidents est que lorsqu’ils sont absents, ils ont une opinion et ils semblent assumer une responsabilité. Mais lorsqu’ils sont présents, l’on a à faire à d’autres hommes. Et finalement, on se demande qui trompe qui. On ne fait pas un gouvernement par rapport à une échéance électorale. Aussi, il convient de faire la démarcation entre un homme d’Etat et un homme politique. Ce sont là deux personnages qui évoluent en raison inverse, puisque l’homme politique pense à la prochaine élection, tandis que l’homme d’Etat se soucie de la prochaine génération. C’est pourquoi le président de la République ne devrait en aucun cas lier les actes à poser à des calculs de politique politicienne ou à des visées électoralistes. Cap sur le futur Après trois gouvernements qui ont produit leurs effets – qualitatifs ou non –, aujourd’hui, la Guinée a besoin d’un gouvernement nouveau pour reprendre confiance et espoir. Mais surtout un gouvernement beaucoup plus volontariste et pragmatique. Par conséquent, un gouvernement d’action. Et la Constitution confère au chef de l’Exécutif de le mettre en place. Ceci relève de sa prérogative discrétionnaire et constitutionnelle de remanier le gouvernement, quoiqu’à cet effet, aucune échéance spécifique ne soit indiquée bien qu’à certains moments, cela parait plus nécessaire que d’autres. Mais pour qui connait l’homme à la fois imprévisible et insaisissable, il n’y a pas à s’étonner de voir reconduite dans le prochain gouvernement l’écrasante majorité de ceux qui composaient le sortant. Encore moins, parier sur l’éventuelle éjection du Premier ministre Mamady Youla.
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