Revendications syndicales : ces révélations du docteur Makanéra qui épingle l’Etat Guinéen (document)
« Attention ! Une précision s’impose. Il faut savoir que les 500 milliards dont on parle sont largement supérieurs à la revendication du syndicat des enseignants. Ils correspondent à l’ensemble des revendications de tous les fonctionnaires dont le nombre est estimé à environ 100.000(cent mille), alors que les enseignants sont moins de 10.000 (Dix mille). De ce fait, l’État doit nous informer sur l’incidence réelle de la revendication du syndicat des enseignants qui est probablement beaucoup moindre que les 500 milliards qu’il brandit . » Il est possible de satisfaire les revendications des syndicats sans créer de déficit. En effet, le montant total demandé pour tous les fonctionnaires en 2017 est évalué à 500 milliards de francs guinéens par an. Avec ce montant, les problèmes actuels peuvent être résolus. Ainsi, pour satisfaire les revendications syndicales et au-delà, améliorer le quotidien de tous les Guinées, le gouvernement doit procéder au réajustement du budget portant sur les dépenses et les recettes de l’État. A souligner que le budget de l’État et les exploitations minières sont aujourd’hui des instruments les plus redoutables de spoliation des Guinéens au profit d’une minorité bien identifiée ou identifiable. Le terme « anomalie budgétaire »que j’ai adopté pour qualifier ces faits, est certes respectueux, mais pas adapté car, il s’agit tout simplement d’une fraude organisée, une sorte de caisse noire au profit de la minorité en question. Sans vouloir entrer dans les détails et dans l’impossibilité de pouvoir m’étendre sur tous les mécanismes de fraudes qui encerclent le budget de l’État guinéen, il me semble utile d’en indexer quelques uns à travers les dépenses d’une part (I) et les recettes d’autre part (II).
I-) Anomalie de certaines dépenses de l’État
Il est nécessaire de rappeler que le budget de la République de Guinée comprend plus de 12.000 lignes budgétaires dont l’exécution permet des détournements et aux mauvaises gestions des deniers publics. On n’y trouve des lignes inacceptables, volontairement destinées à l’enrichissement illicite de certains cadres au sommet de l’État. L’un des secteurs par lesquels saignent les finances publiques de façon très abondante est celui de la passation des marchés publics. Dans ce secteur, le détournement de biens publics se fait à l’échelle industrielle et de façon généralisée(A). De ce fait, le réajustement des dépenses s’imposent (B).
A-) Dépenses de marchés publics
Il est difficile d’évaluer l’ampleur réelle des détournements dans les passations des marchés publics. Les rapports semblent indiquer qu’ils sont orchestrés, tant au niveau de la présidence de la République et du gouvernement, qu’au niveau de l’Assemblée nationale, de la CENI et d’autres institutions constitutionnelles. Il est à retenir aussi que les détournements de biens de l’État ne se limitent pas au secteur des marchés publics. Il existe d’autres façons de frauder l’État qui consistent à créer des doubles emplois dans l’exécution des dépenses publiques. Elles se traduisent notamment par des lignes de crédits affectées à des dépenses sans objet et dépourvues de tout caractère public. Des crédits affectés aux institutions inexistantes qui sont pourtant décaissés.
Les rapports des partenaires techniques et financiers de l’État (FMI, BM ) avaient démontré que les passations des marchés publics en Guinée enfreignaient gravement aux règles et procédures en vigueurs.
Ainsi, en 2017, sous la pression combinée du FMI et de la Banque mondiale, le Ministère de l’Économie et des finances de la République de Guinée avait commandé un audit des marchés publics passés par un échantillon de 24 autorités contractantes sur l’exercice 2013, 2014 et le premier semestre 2015. Ce rapport d’audit avait conclu sur le constat suivant :
13% des marchés publics passés sont conformes aux règles et aux procédures ;
-
63% des marchés publics passés sont non conformes aux règles et aux procédures ;
-
24% des marchés publics passés n’ont pu être audités pour carence documentaire.
Extrait du Rapport du ministère de l’économie et des finances de la République de Guinée
Le résultat de ces audits commandés par le ministère de l’Économie et des finances sous la pression des partenaires extérieurs démontre que les 87% des marchés publics passés en Guinée sont entachés d’illégalité et laissent croire aux détournements massifs des deniers public.
Il est à souligner que ces audits, bien que mettant en cause la gestion illégale de milliers de milliards de Francs guinéens, ils ne concernent qu’un petit échantillon de 24 autorités signataires de contrats de marchés publics. Ce qui laisse croire que les fraudes relatives aux contrats portant sur les marchés publics sont immenses. Cependant, le réajustement de certaines dépenses publiques peut diminuer l’ampleur de la corruption dans ce secteur.
B- Réajustement de certaines dépenses publiques
Le secteur des dépenses publiques, connu pour être l’une des portes par lesquelles s’évadent les recettes de l’État, a besoin de véritables réajustements. Sans être exhaustif, je propose des réajustements suivants :
1)- Éliminer les doubles emplois dans les dépenses communes
En matière budgétaire, le double emploi est un moyen très efficace de détournement des ressources publiques. Elle consiste à consacrer plusieurs dépenses au même secteur. Par exemple, si la dépense du personnel d’un ministère est de 100 milliard de FG, on n’y consacre deux lignes budgétaires de 100 milliards chacune, qui finiront par coûter 200 milliards de FG à l’État au lieu 100 milliards. Les100 milliards de trop étant destinés à l’alimentation des circuits de détournement de biens publics.
Les titres 2, 3, 4 et 5 des dépenses communes constituent des doubles emplois par excellence au sens des finances publiques du terme. Ce montant est égal à : 1.913.892.558.000 FG (1913 milliards, 892 millions, 558 milles Francs guinéens) qui se décompose comme suit :
T2. Dépense de personnel : 240029674.000
T3. Dépense de biens et services : 573.634.561.000 (2018)
T4. Dépense de transfert : 907093957.000
T5. Dépense d’investissement : 193. 134.366.000