Le général Oleksandr Syrsky, nommé «héros de l’Ukraine» par Volodymyr Zelensky

Le général Oleksandr Syrsky, commandant des forces terrestres, est l’un des nouveaux héros de l’Ukraine. Depuis début septembre, il est à la manœuvre dans la contre-offensive face aux forces russes dans la région de Kharkiv, sur le front nord-est du pays. Entouré de ses hommes au garde à vous, le général Oleksandr Syrskyi fait hisser le drapeau bleu et jaune sur la place centrale de Balakliia, le 10 septembre, au son de l’hymne national. L’armée ukrainienne a partagé une vidéo de la scène, sous-titrée en anglais, sur Twitter.
« Aujourd’hui, nous terminons la libération de Balakliia, la première grande ville de notre offensive, lance l’officier, visiblement peu à l’aise dans ce genre d’exercice. Devant nous, il y a Koupiansk qui a déjà été à moitié reprise par nos troupes. Il y a aussi Izioum et bien d’autres villes. »
Quatre jours après cette courte cérémonie sur la place centrale de Balakliia, la ville d’Izioum était libérée et le général y recevait le président Zelensky. « Il n’était pas vraiment connu du grand public jusqu’à cette contre-offensive de Kharkiv », explique Oleksii Holobutskyi, directeur adjoint du groupe de réflexion Situations Modeling Agency. À Kiev, « l’un des plus populaires, en ce moment, en Ukraine, c’est le général Zaloujny, le chef des forces armées ukrainiennes, complète le politologue. Par ailleurs, il se dit que le général Syrsky n’aime pas beaucoup prendre la parole, se mettre en avant. Contrairement à d’autres, il ne mène pas d’activités publiques ».
Une attaque surprise à l’est de Kharkiv et la défense de Kiev
Officier militaire de carrière, Oleksandr Syrsky a gravi les échelons de commandant de peloton jusqu’au rang de général. Né le 26 juillet 1965 dans le village de Novinki, dans la région de Vladimir, en Russie soviétique, il est sorti diplômé de l’École supérieure de commandement militaire de Moscou en 1982. Il a accompli l’essentiel de sa carrière militaire dans l’Ukraine post-soviétique. À partir de 2014, il a occupé plusieurs postes de commandement dans le Donbass et s’est illustré lors de la bataille de Debaltseve en 2015. Depuis 2019, le général Syrsky est le commandant des forces terrestres de l’armée ukrainienne.
Selon plusieurs experts, l’idée d’une attaque surprise à l’est de Kharkiv, au moment où l’armée ukrainienne était engagée dans sa contre-offensive sur le front sud à Kherson, revient au général Syrsky, qui aurait même dû convaincre le commandement militaire du bien-fondé de son plan. Des affirmations qualifiées de « rumeurs infondées » par le ministère ukrainien de la Défense.
Mais le premier grand succès militaire du général Syrsky depuis le début de l’invasion russe, remonte à fin mars, avec la défense de la capitale qui lui avait été confiée. Il a, dans la foulée, été distingué par le président Volodymyr Zelensky, qui l’a nommé « héros de l’Ukraine », souligne Ruslan Bortnik, expert de l’institut ukrainien de politique (UIAMP) à Kiev.
Dans une interview du général, le Washington Post écrit :
Réservé et réfléchi, le colonel général Oleksandr Syrsky est le genre d’officier chevronné, qui se prépare à toutes les éventualités, même celles qu’il considère comme hautement improbables.
Dans le quotidien américain, l’officier confie qu’il ne « pouvait même pas imaginer » une opération d’envergure des forces russes visant l’ensemble de son pays. Mais le général, devenu officier de liaison entre le ministère ukrainien de la Défense et l’Otan en 2013, avait fait préalablement déplacer des unités et du matériel vers les principales voies d’accès à la capitale et organisé deux lignes de défense autour de Kiev.

L’armée ukrainienne à « un niveau sans précédent » de popularité
Après le deuxième succès engrangé en septembre, les médias et les réseaux sociaux n’ont pas tari d’éloges envers Oleksandr Syrsky. Cette campagne pourrait avoir un but plus politique, selon Ruslan Bortnik.
L’attention particulière que lui prête le président ukrainien, les médias, est perçue comme une tentative de faire en sorte que le général Zaloujny ne remporte pas tous les lauriers parce qu’il est extrêmement populaire en Ukraine et il pourrait même être un candidat potentiel à la présidence du pays.
L’armée jouit actuellement en Ukraine d’un très fort taux de popularité, explique le politologue, citant un sondage qui lui accorde 87% de soutien populaire, « un niveau sans précédent ». Dans ce contexte, « les chefs militaires pourraient devenir, à l’avenir, les hommes politiques les plus importants du pays. Or, un tel scenario n’arrange pas les tenants du pouvoir actuel », croit savoir Ruslan Bortnik, qui a le sentiment « qu’ils vont s’employer à rendre populaires de plus en plus de généraux-héros pour faire en sorte que la gloire ne revienne pas qu’à une seule personnalité. »
Le pouvoir ukrainien cherche-t-il à opposer le général Syrskyy à l’actuel chef des forces armées ukrainiennes, le général Valeriy Zaloujny ? « Il est tout à fait possible que de telles intrigues existent, que d’aucuns considèrent le général Zaloujny comme trop indépendant, ou trop ambitieux », note Oleksii Holobutskyi. Pour autant, « dans notre pays, et surtout en ce moment, il est très difficile de comprendre d’où vient cette initiative. Cela peut venir du pouvoir comme d’autres acteurs. Avant cela, nous n’avions que Zaloujny et maintenant que nous avons aussi Syrsky, nous voyons apparaître des théories du complot, expliquant qu’on veut en faire une alternative à Zaloujny où qu’il va le remplacer ». Pour l’heure, le général Zaloujny jouit d’une autorité indiscutable, quant à ses prétendues tensions avec le président ukrainien, le politologue souligne : « Zelensky comme Zaloujny nous disent que leur relation est normale. »
Libreopinionguinee Avec RFI